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JOURNAL

Nous avions quelqu’avantage là-dessus par la circonstance que voici. C’est que nous étions seuls dans cet établissement et surtout que notre surintendant qui avait toujours été lieutenant dans l’armée, n’était pas bon juge, en fait d’ouvrage ; et nous pouvions quelquefois lui en faire passer. Que l’on ne croit pas que cet avantage provenait plutôt de sa bonne foi ou de son humanité que de son ignorance. Car, il faut le dire, c’était un vrai tyran, un homme sans caractère, et abusant de son pouvoir pour nous maltraiter toutes les fois qu’il en trouvait l’occasion ; il ne venait nous voir que pour le plaisir de nous quereller : et voilà tout et nous pouvons déclarer que si nous n’avons pas été punis, cela est dû à notre bon comportement, à notre patience et à notre constance à supporter avec énergie beaucoup de mauvais traitements que nous souffrions journellement, et non pas à l’humanité de notre despotique surintendant dont le nom était Henry Clinton Badly. Encore plusieurs d’entre nous, malgré toutes les précautions prises pour mériter son ressentiment, furent punis du cachot et journellement tourmentés, chicanés de la manière la plus pénible et de la manière la plus grossière, sans aucun égard à l’âge qui était insulté par d’indignes menaces. Cet homme si heureusement nommé Baddly, avait été revêtu d’un pouvoir illimité sur nous par le gouverneur. En vain nous exhalèrent nos plaintes : elles ne furent pas entendues. Nous fîmes aussi application pour avoir un surplus dans nos rations ; exposant qu’il nous était impossible de résister à un tra-