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D’UN EXILÉ

nous sachions que notre nouvelle situation ne devait pas être agréable, nous éprouvions pourtant beaucoup de joie en songeant que nous étions enfin rendus à notre destination. Il faut passer cinq longs mois en mer pour connaitre combien il est doux de mettre le pied à terre et d’être délivré de la gêne du vaisseau !

Le 26 et 27 nous montâmes sur le Pont comme à l’ordinaire, nous regardâmes avec horreur cette terre que nous désirions avec tant d’ardeur quelques jours avant. De dessus le Pont nous voyions des misérables attelés sur des charrettes occupés à traîner de la pierre pour quelques Édifices Publiques ; d’autres en arrachaient ; cette vue nous fit faire de tristes réflexions, car nous pensions que sous peu de jours, nous serions employés comme eux. On nous dit que le 29 nous débarquerions. Le 27 nous reçûmes la visite de l’Évêque Catholique et d’un Prêtre. Ces révérends messieurs avaient appris qu’un tel vaisseau venant du Canada, avait à son bord, un certain nombre de prisonniers Canadiens Français, tous Catholiques ; et pensant que leur visite nous serait agréable, ils vinrent nous voir. L’Évêque était Anglais et son Secrétaire Irlandais, tous deux parlaient le français. Ils nous firent plusieurs questions : s’informèrent de l’état de notre santé, et des particularités de notre voyage etc., — nous entretinrent durant une heure et demie environ, nous parlant toujours avec le plus grand respect, nous dirent qu’ils verraient à ce qu’on ne mît aucun obstacle à l’exercice de notre religion et terminèrent leur bien-