Page:Duboscq - Unité de l'Asie.djvu/21

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tivisme et d’irréligiosité est le mieux établie, nous reconnaissons volontiers qu’en effet les Chinois n’ont pas de religion si l’on entend par là la croyance à un monde transcendant ; mais nous affirmons au contraire qu’ils en ont une si l’on donne au mot religion le sens de préoccupation de l’universel. « Si, dans un monde qui est fait de l’entre-croisement de forces sacrées, écrit M. Marcel Granet dans La religion des Chinois, les Chinois vivent sans préoccupations religieuses apparentes, leur existence n’en est pas moins commandée par des sentiments, peu conscients à la vérité, qui sont de nature religieuse au sens le plus strict de ce mot. Ces sentiments sont, à peu de chose près, les mêmes que ceux qui dominaient la vie de leurs ancêtres. L’idée est restée puissante d’une solidarité active entre l’homme et le monde : chacun sent la nécessité d’une organisation de l’existence conforme à l’ordre des choses, et par suite orientée, si je puis dire, dans le temps et l’espace : d’où l’importance du calendrier et de la géomancie (fong-chouei)[1]. »

Et le même auteur, dans son dernier ouvrage intitulé La Pensée chinoise, précise : « On a souvent dit que les Chinois n’avaient point de religion et parfois enseigné que leur mythologie était autant dire inexistante. La vérité est qu’en Chine la religion n’est pas plus que le droit une fonction différenciée de l’activité sociale… Le sentiment du sacré joue,

  1. La religion des Chinois, p. 193 (Gauthier-Villard)