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III

« Il suffit d’avoir vécu, dit Montaigne, pour avoir tout vu et le contraire de tout ». En matière de réglementation économique comme d’autre chose, en effet, on a vu appliquer tous les systèmes, toutes les doctrines à un même pays ; on est passé du protectionnisme le plus ombrageux au libre échange le plus échevelé pour revenir au protectionnisme ou à un système intermédiaire. L’évolution paraît, en cette matière, on ne peut plus chaotique. On dirait que les doctrines économiques suivent une mode, ni plus ni moins que la coupe des vêtements. Il semblerait qu’au contraire l’évolution de l’économie politique dût s’écouler majestueusement, tel un beau fleuve entre les digues élevées par les économistes ; il semblerait que, commandée par les faits, elle ne nécessitât guère plus de leur part que de l’observation et de la méthode, et que l’on pût leur faire, à propos des principes qu’ils ont à fixer, la recommandation que Lao-Tseu adressait aux gouvernants. « Il faut, leur disait-il, gouverner avec la simplicité que l’on met à faire cuire un petit poisson ». Et pourtant elle suit les orientations les plus opposées.

Le monde tendant à s’organiser en grands espaces constituant des unités économiques englobant plusieurs pays capables de se suffire à elles-mêmes, il est question à présent d’une nouvelle doctrine