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le fond même de la nature humaine. Les passions qui animèrent les foules de l’antiquité se retrouvent chez celles d’à présent.

Cependant, certains esprits veulent ramener à l’intérêt seul les mobiles qui les font agir. Du fait précisément des « vérités éclatantes issues des laboratoires », ils croient voir poindre à l’horizon une civilisation universelle. Leur opinion se fonde sur l’emploi généralisé dans le monde des mêmes méthodes de progrès et des mêmes commodités mises par la science à la portée de tous. Il en découle naturellement une tendance à faire table rase de tout élément moral et cependant ces mêmes esprits prêchent la nécessité d’un lien entre les nations, ramenant ainsi l’élément moral qu’ils viennent d’exclure. Sentant la contradiction, mais pour laisser à ce lien un caractère aussi matérialiste que possible, ils l’opposent à l’ancienne communauté de l’Europe occidentale fondée sur la foi et ils substituent à la chrétienté la communauté de civilisation au sens moderne du progrès.

Leur effort ne saurait aboutir. Si le progrès, c’est-à-dire l’usage des mêmes instruments de production, l’emploi des mêmes techniques joints à la facilité de plus en plus grande des communications, peuvent unifier les nations, mieux vaudrait dire uniformiser les nations, ils ne sauraient les unir ; « la matière, a dit quelqu’un avec raison, est essentiellement diviseuse et les hommes ne communient que dans l’immatériel ».