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séjour à l’étranger. On connaît l’anecdote : Tchang Tche Tong, le fameux lettré, qui fut longtemps en France et à qui l’on montrait, un jour, un énorme livre de trigonométrie destiné à des étudiants français, déclara après l’avoir feuilleté, soupesé : « Pour nos élèves, c’est l’affaire d’un mois. » Apprendre par cœur : tel est le moyen d’assimilation du Chinois, d’assimilation superficielle s’il en fût et qui surprenait tellement, en le décevant d’ailleurs, M. Paul Painlevé, lors de sa mission en Chine, il y a une douzaine d’années[1].

Ce n’est pas par la mémoire que s’acquièrent les qualités de guides de la nation. Ceux qui devront chercher uniquement dans leur mémoire la solution des problèmes qui se posent continuellement à un pays, ne feront jamais que des dirigeants médiocres. La première difficulté les désarçonnera et tandis qu’ils inventorieront leur arsenal de solutions déjà éprouvées, ils laisseront passer l’opportunité de la résoudre eux-mêmes. Qu’importe qu’ils se souviennent ou non ! À quoi sert tel antécédent périmé ? Ce n’est pas dans leur mémoire qu’il leur

  1. Un professeur européen qui enseigna les sciences à des milliers de Chinois nous déclara : « Les Chinois ont des dispositions pour l’arithmétique même supérieure et l’algèbre, mais ni pour la géométrie ni pour la trigonométrie ; ils n’ont pas d’imagination scientifique. En physique, en chimie, de même qu’en médecine, ils abusent de leur mémoire. »