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d’eau pure, et qui ne connoissent que par imagination le plaisir décrit par le poëte, les vers de la cinquiéme églogue de Virgile, qui font une image si pleine d’attrait du plaisir que goûte un homme accablé de fatigue à dormir sur un gazon, et le voïageur brulant de soif à se désalterer avec l’eau d’une source vive. C’est la destinée de la plûpart des images dont les poëtes anciens se sont servies judicieusement pour interesser leurs compatriotes et leurs contemporains. Une image noble dans un païs, est encore une image basse dans un autre. Telle est l’image que fait un poëte grec d’un asne, animal qui dans son païs étoit bien fait et qui avoit le poil luisant, au lieu qu’il est vilain dans le nôtre. D’ailleurs cet animal que nous ne voïons jamais que couvert pauvrement et abandonné à la populace pour la servir dans les travaux les plus vils, sert ailleurs de monture aux personnes principales de la nation, et souvent il paroît couvert d’or et de broderie. Voici,