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s’occupent des imitations comme d’un travail, au lieu que les autres hommes ne les regardent que comme des objets interessans. Ainsi le sujet de l’imitation, c’est-à-dire, les évenemens de la tragédie et les expressions du tableau, font une impression legere sur les peintres et sur les poëtes sans génie, qui sont ceux dont je parle. Ils sont en habitude d’être émus si foiblement, qu’ils ne s’apperçoivent presque pas si l’ouvrage les touche ou s’il ne les touche point. Leur attention se porte toute entiere sur l’execution mécanique, et c’est par là qu’ils jugent de tout l’ouvrage. La poësie du tableau de Monsieur Coypel, qui représente le sacrifice de la fille de Jepthé ne les saisit point, et ils l’examinent avec autant d’indifference que s’il représentoit une danse de païsans ou quelque sujet incapable de nous émouvoir. Insensibles au pathétique de ses expressions, ils lui font son procès en consultant uniquement la regle et le compas, comme si un tableau ne devoit pas contenir des beautez supérieures à celles dont ces instrumens sont les juges souverains. C’est ainsi que la plûpart de nos poëtes examineroient le Cid si la piece étoit