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l l’appelle ailleurs le poëte par excellence et le premier de tous les inventeurs. Si Platon exclut les poëtes de sa republique, on voit bien qu’il ne les en exile que par la même raison qui engage les prédicateurs à prêcher contre les spectacles, et qui faisoit chasser d’Athenes ceux des citoyens qui plaisoient trop à leurs compatriotes.

Voilà les motifs qui font proscrire à Platon la partie de l’art poëtique qui consiste à peindre et à imiter ; car il consent à garder dans sa république la partie de cet art qui enseigne la construction du vers et la composition du métre, c’est la partie de l’art qu’on nomme souvent versification, et que nous appellerons quelquefois dans ces reflexions la mecanique de la poësie. Platon vante même assez cette partie de l’art poëtique, laquelle sçait rendre un discours plus pompeux et plus agréable à l’oreille, en introduisant dans ses phrases un nombre et une harmonie qui lui plaisent plus que la cadence de la prose. Selon lui les loüanges des dieux et celles des heros mises en vers en deviennent plus capables de plaire et de se faire retenir. Le but de Platon est toujours de conserver dans son état les parties d’un art qui sont presqu’incapables de nuire, lorsqu’il proscrit celles qui lui semblent trop