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bien hatez de la perfection de ces rimes. C’est plûtôt par reflexion que par sentiment qu’on en connoît le merite, tant le plaisir qu’elle fait à l’oreille est un plaisir mince. On me dira qu’il faut qu’il se trouve dans la rime une beauté bien superieure à celle que je lui accorde. L’agrément de la rime, ajoûtera-t-on, s’est fait sentir à toutes les nations. Elles ont toutes des vers rimez. En premier lieu, je ne disconviens pas de l’agrément de la rime ; mais je tiens cet agrément fort au-dessous de celui qui naît du rithme et de l’harmonie du vers, et qui se fait sentir continuellement durant la prononciation du vers métrique. Le rithme et l’harmonie sont une lumiere qui luit toûjours, et la rime n’est qu’un éclair qui disparoît après avoir jetté quelque lueur. En effet la rime la plus riche ne fait qu’un effet bien passager. à n’estimer même le mérite des vers que par les difficultez qu’il faut surmonter pour les faire ; il est moins difficile sans comparaison de rimer richement que de composer des vers nombreux et remplis d’harmonie. On trouve des embarras à chaque mot lors qu’on veut faire des vers