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sonne, fut neanmoins un tems sans accepter l’Empire, ou toutes les Dignités qui lui devoient attribuer le Gouvernement souverain, et qu’il fallut l’engager par prieres à déclarer enfin qu’il vouloit bien les accepter.

Toutes les Dignités dont il a été parlé ne furent déferées à Auguste par le Peuple Romain qu’en differens tems, mais dans la suite elles furent déferées à ses Successeurs par un seul et même Decret du Sénat. Le pouvoir de faire cette Loi fut ôté au Peuple et attribué au Senat dès le regne de Tibere puisque ce fut alors que le Peuple perdit le droit de nommer aux grandes Magistratures. Non-seulement toutes les Dignités dont les droits formoient l’autorité Imperiale étoient conferées au nouvel Empereur par un seul et même Décret, mais elles lui étoient encore conferées pour sa vie.

Justinien a donc raison de dire, que les décisions du Prince ont force de Loi, d’autant que tous les Citoyens se sont dépouillés en sa faveur, du pouvoir appartenant à la Societé sur chacun de ses Membres, quand le peuple a fait la Loi Royale par laquelle il lui a déferé l’Empire. On va voir par ce qui suit, que le Peuple étoit toûjours representé par le Sénat. Lorsqu’il falloit faire une nouvelle Loi Royale à chaque mutation d’Empereur.

Ainsi l’ombre, la forme apparente du Gouvernement ancien subsista dans Rome, sous les Empereurs, et l’on continua d’appeller République, un Etat qui étoit la plus absoluë des monarchies : cinq cens ans après la mort d’Auguste et du tems de Gregoire de Tours, on disoit encore quelquefois la République pour dire l’Empire.

Durant long-tems, les nouveaux Empereurs, même ceux qui avoient été proclamés Imperator par une armée révoltée et au mépris de toutes les Loix, ne prirent point le titre d’Auguste, mot qui de nom propre étoit devenu un nom appellatif et signifiant la même chose que Prince ou Souverain, qu’après que le Sénat leur avoit conferé par un Décret, les Dignités, qui, pour s’expliquer ainsi, formoient par leur réünion, la Couronne Imperiale. C’étoit ce Decret qui changeoit les Tyrans en Princes, quoiqu’il fût rendu presque toujours par force, &