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de cette Assemblée. Elle a même droit d’entrer en connoissance de l’administration du Souverain.

Comme il y a toûjours eu des Assemblées representatives du Peuple, qui, pour ainsi dire, ont rendu leur condition meilleure qu’elle ne l’étoit originairement, en s’arrogeant plus d’autorité qu’il ne leur en appartenoit suivant la premiere Constitution de l’Etat ; de même il y en a eu d’autres qui ont laissé perdre les droits qui leur appartenoient en vertu de cette premiere Constitution. Ainsi quelle que pût être sous Auguste et sous les premiers de ses Successeurs l’autorité de l’Assemblée representative des Gaules, il ne s’ensuit pas qu’elle ait été la même dans le cinquiéme siecle. Au contraire nous sommes assez instruits de ce qui se passoit alors, pour sçavoir positivement que cette Assemblée n’avoit plus aucune part au pouvoir legislatif, et qu’elle étoit réduite à la voix consultative dans les affaires de l’Etat. En premier lieu, il est certain que les Empereurs Romains étoient alors des Souverains despotiques, et qu’ils étoient revêtus de tout le pouvoir legislatif, que ces Princes n’étoient point obligés de partager avec personne.

D’autant que nos Rois de la premiere Race ont succedé immédiatement aux Empereurs dans la Souveraineté des Gaules, il est convenable d’expliquer ici de quelle nature étoit le pouvoir des successeurs d’Auguste, et d’exposer quels étoient les droits dont l’assemblage et l’union, formoient pour parler ainsi, le diadême Imperial transmis par l’Empereur Justinien aux enfans de Clovis. La matiere qui n’est rien moins qu’étrangere à mon sujet, n’est point traitée assez clairement ni assez solidement dans aucun Livre que je connoisse, pour y renvoyer ceux qui peuvent souhaiter d’en être instruits.

Le projet d’Auguste lorsqu’il donna une forme au gouvernement de sa Monarchie, fut de rendre et lui et ses Successeurs des Souverains aussi absolus que l’étoient les Rois d’Asie, sans changer cependant que le moins qu’il seroit possible, la forme exterieure et apparente du gouvernement Republiquain, sous lequel on avoit jusques-là vêcu dans Rome. Voilà pourquoi, il refusa toujours la Dictature qui lui fut offerte plusieurs fois par le Peuple. S’il eut accepté cette dignité, le changement de la Republique en une Monarchie despotique, auroit été trop sensible.