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fait un objet du dessein d’abolir les anciens usages concernant la servitude, il ne faut point être surpris, que sous les premiers Rois de la troisiéme Race, la France fut encore remplie d’Esclaves dont il semble que le nombre excedoit de beaucoup celui des Citoïens. Il n’est donc pas vrai que la multitude de gens de pôte & de Serfs de tout genre & de toute espece, qu’on voit avoir été dans le Royaume sous Hugues Capet & sous ses douze premiers successeurs, provenoit comme quelques Auteurs l’ont imaginé, de ce que les Francs avoient reduit en servitude l’ancien Habitant des Gaules, quand ils s’établirent dans ce païs. Elle provenoit uniquement de ce que les Gaules, ainsi que les autres Provinces de l’Empire, étoient plus peuplées d’Esclaves que d’hommes libres, quand elles passerent sous la domination de nos Rois. J’ai cru devoir ici prévenir mes Lecteurs sur un point d’une si grande importance, quoique je doive en parler ailleurs.

Nous diviserons en premier lieu les Citoïens, ou les Habitans de la Gaule qui étoient de condition libre, en Ecclesiastiques & en Laïques.

Il y avoit dans chaque Capitale des cent quinze Cités des Gaules, du moins à l’exception de quatre ou cinq villes, un Siége Episcopal. Les Siéges qui étoient placés dans les Métropoles de chacune des dix-sept Provinces, s’appelloient Siéges Métropolitains, parce que ceux qui les remplissoient avoient une primauté de rang & de jurisdiction sur les Evêques de la Province, dont cette Cité étoit la Capitale. On ne donnoit encore neanmoins que le nom d’Evêques aux Prélats qui remplissoient les Siéges Métropolitains. Ils n’ont pris le titre d’Archevêque que long-tems après le cinquiéme siécle.

Le Clergé Seculier et le Clergé Regulier, étoient alors également soumis à l’autorité des Evêques. Mais tout ce qui concerne l’Histoire & la Discipline de l’Eglise Gallicane, a été si bien expliqué par des Sçavans illustres, & dont les écrits sont entre les mains de tout le monde, que je me bornerai à parler de nos Evêques uniquement comme de Citoïens qui tenoient un grand rang dans leur Patrie, & qui avoient beaucoup de part aux révolutions. En effet les droits attachés dès lors à la dignité Episcopale, ne pouvoient pas manquer de donner à ceux qui s’en trouvoient revêtus, une grande consideration & un grand crédit dans la Societé. Durant le cinquiéme siécle les Evêques avoient le pouvoir de disposer ainsi qu’ils le jugeoient à propos, des biens de leur Eglise ; & la plûpart des Eglises étoient déja richement