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l’année quatre cens quatre-vingt-six, voulut engager Cararic à joindre ses forces aux siennes ; Cararic n’en voulut rien faire. Le roi des Saliens fut, comme on peut bien le croire, piqué jusqu’au vif de ce refus, et sans doute il eût satisfait son ressentiment bien-tôt après sa victoire, si Cararic eût été son inférieur, et si le refus que Cararic avoit fait, eût pû être traité de félonie. Néanmoins Clovis après avoir pleinement triomphé de Syagrius, ne dit rien à Cararic. Clovis differa sa vengeance pendant plus de vingt années faute de trouver occasion de l’exercer plûtôt. Il ne put, comme nous le verrons, se faire raison de Cararic qu’en l’année cinq cens neuf. On observera même que lorsque Clovis se vengea, ce ne fut point en superieur qui se fait justice d’un inferieur contumace  ; ce fut en égal et par des voyes qui font bien voir qu’il n’avoit aucune sorte de jurisdiction sur celui qu’il sacrifioit à son ressentiment. » Dès que Clovis, dit Gregoire de Tours, eût été proclamé Roi des Ripuaires, il marcha contre Cararic. Dans le tems que Clovis se disposoit pour faire la guerre à Syagrius, il avoit prié ce Cararic de le joindre, mais Cararic n’avoit point jugé à propos de prendre part à la querelle, & il n’avoit donné aucun secours ni à l’un ni à l’autre parti. Son dessein étoit d’attendre à se déclarer qu’il eût vû le succès de la guerre, afin de s’allier ensuite avec le vainqueur. Un pareil procedé irrita beaucoup contre Cararic le Roi des Saliens. Ce fut donc pour satisfaire son ressentiment que Clovis entreprit de perdre Cararie, & les pieges qu’il lui dressa se trouverent si bien tendus, que ce Prince malheureux & son fils y tomberent, & devinrent ses prisonniers. » Nous verrons le reste en son lieu.

Ce qui acheve de montrer que les rois Francs contemporains de Clovis étoient indépendans les uns des autres, c’est que les rois Francs successeurs de Clovis étoient aussi peu dépendans les uns des autres que le sont aujourd’hui les têtes couronnées. Quoiqu’ils descendissent tous de Clovis, et qu’il y eût par consequent parmi eux une ligne aînée, le chef de cette ligne n’avoit aucune sorte d’autorité ou d’inspection sur