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tribus de la nation des Francs, étoient indépendans les uns des autres ; tous les rois qu’on vient de nommer, étoient bien en quatre cens quatre-vingt-un les alliés de Clovis, mais ils n’étoient pas ses sujets, ni même pour parler le langage des siecles postérieurs, ses vassaux. Les tribus sur lesquelles ces princes regnoient ne passerent sous la domination de Clovis, qu’en cinq cens neuf au plûtôt. Ce fut alors seulement que ce prince qui n’avoit été jusques-là, qu’un des rois des Francs, devint roi de tous les Francs, ou roi des Francs absolument.

Quand les titres de plusieurs princes sont égaux, la raison veut qu’on suppose que leur rang soit égal, à moins que le contraire n’apparoisse par quelque preuve autentique. Or tous les chefs des differentes tribus du peuple Franc portoient alors également le nom de roi, et l’on ne trouve point dans les monumens du cinquiéme et du sixiéme siecles, que parmi ces rois il y en eût un dont la couronne fût d’un ordre supérieur à celle des autres, de maniere qu’elle donnât droit au prince qui la portoit de se faire obéïr par ceux dont le titre étoit égal au sien, comme par des inferieurs : il y a plus, les monumens litteraires de nos deux siecles fournissent plusieurs faits capables de prouver que Clovis n’avoit aucune supériorité de jurisdiction, ni de commandement sur les autres rois des Francs.

Lorsque Clodéric fils de Sigebert roi des Ripuaires eut tué son pere, Clovis qui avoit formé le projet de se défaire du meurtrier pour s’emparer du royaume de Sigebert, ne fit point le procès au meurtrier devant sa tribu, qui ne pardonnoit pas non plus que les autres tribus des Francs, le parricide et les crimes de leze-majesté. Clovis en usa comme un prince en use en cas pareils envers un autre prince, qui n’est son justiciable en aucune maniere. Le roi des Francs Saliens trama un complot contre Clodéric, et ce fut en conjuré, et non point en juge qu’il le fit mourir. Clovis le fit assassiner par des meurtriers apostés. Nous raconterons ce fait plus au long quand il en sera tems.

D’ailleurs depuis qu’il y a des empires et des monarchies, la subordination d’une couronne à une autre couronne, a toujours établi en faveur de la couronne dominante, le droit de réünir à elle la couronne inférieure au défaut de ceux qui étoient appellés à la porter, ou du moins le droit d’en disposer en faveur d’un tiers capable de la porter. Dès que les royaumes dépendans de l’empire Romain venoient à