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bablement il s’étendoit jusques dans l’Isle des Bataves du côté du septentrion, faisons voir que des trois autres côtés il ne pouvoit gueres s’étendre au-delà des limites de la cité de Tournai. Du côté de l’orient, le Tournaisis confinoit avec la cité de Tongres, et peut-être avec celle de Cologne ; car qui peut sçavoir précisement quelles étoient alors les limites de ces trois cités. Or nous sçavons par l’histoire que Clovis n’occupa la cité de Cologne qu’après la mort de Sigebert roi des Ripuaires arrivée au plûtôt en l’année cinq cens neuf. Quant à la cité de Tongres, Gregoire De Tours dit en termes exprès que Clovis ne la subjugua que la dixiéme année de son regne. Du côté du midi, le royaume de Clovis étoit borné par celui de Regnacaire qui tenoit la cité de Cambrai. Nous verrons encore que Clovis, lorsqu’il eut affaire contre Syagrius en quatre cens quatre-vingt-six, n’étoit point le maître de la cité de Reims dont le diocèse de Laon n’avoit pas encore été démembré. Tenoit-il quelque chose dans la cité de Vermandois ? Je l’ignore. Enfin l’état du roi Cararic, qu’on ne sçauroit placer ailleurs qu’entre l’ocean et l’Escault, devoit bien resserrer du côté de l’occident le royaume de Clovis. D’ailleurs on verra par la suite de l’histoire, que ce prince conquit et qu’il ne conquit qu’en differens tems, tous ceux des pays qu’il laissa unis à sa couronne quand il mourut, et qui ne sont point du nombre de ceux dont nous avons dit qu’il herita.

On ne sçauroit dire que j’aye tort de circonscrire le royaume de ce prince dans des bornes aussi étroites que le sont celles que je lui ai marquées : on ne sçauroit alleguer que s’il est vrai en un sens que le royaume de Clovis étoit borné au Tournaisis, et à quelques pays alors peu habités, il est aussi vrai dans un autre sens que le royaume de Clovis étoit beaucoup plus étendu ; puisque le roi des Ripuaires, le roi de Cambrai, et les autres rois Francs étoient dépendans de lui, et qu’il pouvoit disposer de leurs forces ainsi que des siennes propres. Cette supposition qui fait de tous les Etats possedés alors par les differentes tribus des Francs un seul et même corps d’Etat gouverné par le même chef suprême, en un mot un seul et même royaume, a contribué autant qu’aucune autre erreur, à donner une fausse idée de l’établissement de notre monarchie. Je vais donc montrer que dans le tems où Clovis succeda au roi Childéric, les rois des differentes