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parce que le pouvoir civil y étoit toujours exercé par les officiers subordonnés au préfet du prétoire des Gaules. Quoiqu’il n’y eût plus alors dans Arles, qui étoit sous la puissance des Visigots, un préfet du prétoire, néanmoins les officiers qui lui répondoient, ses subalternes, continuoient d’exercer leurs fonctions chacun dans son district particulier, sous la direction ou du président de leur province, ou du sénat de chaque ville. Mais lorsque saint Remy écrivit sa seconde lettre à Clovis, celle que nous avons promis de rapporter ; Clovis s’étoit déja rendu maître, comme on le verra, de toute la partie des Gaules qui est entre la Somme et la Seine. Après y avoir exercé quelque-tems le pouvoir militaire seulement, il s’y étoit arrogé le pouvoir civil. Enfin Clovis étoit chrétien. Il est vrai que saint Remy donne déja dans la suscription de sa premiere lettre, de celle que nous avons rapportée, le titre de Dominus ou de seigneur à Clovis. Mais saint Remy vivoit dans le cinquiéme siécle, tems où les Romains donnoient déja par politesse le titre de seigneur à leurs égaux, et même à des personnes d’un rang inférieur. Combien de lettres de Sidonius Apollinaris écrites à des personnes dont le rang n’étoit pas supérieur au sien, sont adressées au seigneur tel . Mais et ceci seul décideroit ; nous avons dans le recueil de Duchesne des lettres écrites par saint Remy, à des évêques dont il se plaignoit amerement, ausquels il ne laisse pas de donner le titre de Dominus dans la suscription.

Est-il possible, dira-t-on, que les Romains des provinces obéissantes ayent pû nommer, et même qu’ils ayent voulu reconnoître pour maître de la milice un prince qui possedoit déja de son chef un royaume assez considerable, et limitrophe de leur territoire ? N’étoit-ce pas lui mettre en main un moyen infaillible de se rendre bientôt aussi absolu dans leur pays, qu’il l’étoit déja dans son propre état. Je tombe d’accord que les provinces obéïssantes, en reconnoissant le roi des Francs saliens pour maître de la milice, le mirent à portée de se rendre réellement souverain de leur pays, et d’exécuter ce que nous lui verrons faire en l’année quatre cens quatre-vingt-douze. Mais le fait me paroît prouvé ; il est encore rendu très-vraisemblable par l’exemple de Chilpéric roi