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de troupes auxiliaires. C’est encore sur la maniere de gouverner cet Etat que sont donnés les conseils qui concernent le traitement que Clovis doit faire à tous ses sujets, et sur l’obligation de laisser un accès libre à son prétoire. On peut bien penser que Clodion dès qu’il se fût rendu maître par force des pays qui sont au nord de la Somme, n’y souffrit plus aucun des officiers du préfet du prétoire des Gaules, et qu’il s’y mit en possession du pouvoir civil aussi-bien que du pouvoir militaire. Il y aura donc rendu la justice non-seulement aux Francs, mais aussi aux anciens habitans du pays, aux Romains. Tel est encore le conseil de ne parler d’affaires qu’avec les Senieurs, c’est-à-dire avec ceux des Francs, qui par les dignités où leur âge les avoit fait parvenir, étoient les conseillers nés de leur roi, et les meilleurs ministres qu’il pût consulter. Nous parlerons plus au long des Senieurs des Francs dans le dernier livre de cet ouvrage. Quant au conseil de ne point disputer la préseance aux évêques, de prendre leur avis, et de vivre en bonne intelligence avec eux, il regarde Clovis comme maître de la milice. En effet, et nous allons le voir incessamment, il n’y avoit point alors plusieurs évêchés dans le royaume de Clovis. Il n’y avoit que celui de Tournay ; au contraire il y avoit alors plusieurs évêchés dans le département du maître de la milice. Ce qu’ajoûte saint Remy confirme notre observation. Tant que vous vivrez, dit-il, en bonne intelligence avec les évêques, vous trouverez toute sorte de facilité dans l’exercice de votre emploi. Votre province sera beaucoup mieux affermie. on sçait que les Latins disoient souvent : La province de quelqu’un, pour dire son emploi, ou sa fonction, de quelque nature qu’elle fût. Si notre évêque qui parle si bien des vertus chrétiennes, et qui montre un si grand dévouëment pour son prince dans la lettre qu’il écrivit à Clovis quelque-tems après son batême[1], et que nous rapporterons en son lieu, ne parle dans celle que nous commentons à présent, que des vertus morales ; si ce prélat s’y explique moins en sujet qu’en allié, c’est par deux raisons. Clovis étoit encore payen lorsque saint Remy lui écrivit la lettre dont il est ici question, et d’un autre côté saint Remy n’étoit pas encore sujet de ce prince. Clovis n’étoit pour lors reconnu dans le diocèse de Reims, et dans les provinces obéïssantes que pour maître de la milice ; il n’y avoit encore aucune autorité dans les matieres de justice, police et finance,

  1. En l’année 496.