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de lui enlever le butin qu’elle venoit de faire en saccageant un canton de l’Italie. Une expédition aussi périlleuse que celle-là, et entreprise pour un objet de très-petite importance, étoit une partie bien digne des deux freres d’armes qui la lierent, et qui sans doute ne s’y seront engagés, que vers la fin d’un repas. Cependant elle n’étoit pas aussi hazardeuse qu’elle le paroît d’abord. Comme il n’y avoit point en ce tems-là, de troupes reglées dans la Germanie, et comme cette contrée n’étoit point alors remplie de villes et de bourgades, ainsi qu’elle l’est aujourd’hui, un corps de troupes qui marchoit sans machines de guerre, sans gros bagage, et qui étoit accoutumé à ne point trouver des étapes sur la route, pouvoit, lorsqu’il étoit bien mené, traverser tout ce pays-là sans avoir un si grand nombre de combats à rendre. Dans des pays à moitié défrichés, et où les demeures des habitans étoient éparses et éloignées les unes des autres, il lui étoit facile de surprendre le passage des rivieres et des montagnes ou de les forcer avant qu’il se fût rassemblé un nombre de combattans assez grand pour les disputer long-tems. Ce corps pouvoit aussi après avoir percé jusqu’aux lieux où il vouloit pénetrer, prendre à son retour un chemin different de celui qu’il avoit tenu en allant, et revenir dans son pays sans avoir perdu beaucoup de monde. Audoagrius et Childéric se seront apparemment donné rendez-vous sur le Bas-Rhin, et après s’être joints, ils auront marché par la droite de ce fleuve jusqu’aux pieds des Alpes, où ils auront obligé les Allemands ausquels ils en vouloient, à capituler avec eux. Nos deux princes après avoir détroussé ces brigands, consternés de voir qu’il y eût à l’autre bout de la Germanie des hommes qui les surpassoient en audace, seront revenus sans accident chacun dans son royaume.

Voilà tout ce que nous sçavons concernant l’histoire de Childéric. La premiere fois que Gregoire De Tours reparle de ce prince, c’est pour faire mention de sa mort. Il n’est rien dit de Childéric dans les chapitres qui sont entre le dix-neuviéme chapitre du second livre de l’Histoire ecclésiastique des Francs, lequel finit par le récit de l’expédition dont nous venons de parler, et le vingt-septiéme chapitre de ce même livre. Or il commence par ces paroles : Childéric étant mort sa place fut remplie par son fils Clovis. Cependant Childéric a dû survivre quelques années à la pacification des Gaules, puisqu’il n’est mort qu’en quatre cens quatre-vingt-un ; comme