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Moselle, ajoûte : Votre Latin ne se sent en aucune maniere du commerce que vous avez tous les jours avec les Barbares. Comme nos anciens Capitaines, vous vous servez également bien de la plume & de l’épée. C’est chez vous que s’est refugiée l’éloquence Romaine exilée, generalement parlant, de la Gaule Belgique & des contrées voisines du Rhin. Tant que vous composerez, tant que vous respirerez, on pourra dire que la langue Romaine se conserve encore dans toute sa pureté sur la frontiere de l’Empire, bien qu’on n’y obéisse plus aux ordres de Rome. »

Comme rien n’empêche de supposer que cette lettre, qui ne sçauroit avoir été écrite avant l’année quatre cens soixante et douze, n’ait été écrite après l’année quatre cens soixante et seize ; on peut bien croire qu’Arbogaste quoiqu’il commandât dans Treves au nom de l’empire, ne recevoit point pour cela les ordres de Rome, où regnoit Odoacer, et c’est une nouvelle raison pour nous déterminer à penser qu’alors il y avoit plusieurs officiers de l’empire servans dans les Gaules, qui n’obéissoient à aucun empereur. Sidonius à la fin de sa lettre envoye Arbogaste à Auspicius évêque de Toul, à Lupus évêque de Troyes, et à l’évêque de Treves pour être instruit de quelques points de religion sur lesquels ce comte avoit consulté l’évêque de Clermont.

Ainsi je crois qu’après la pacification de quatre cens soixante et dix-sept, l’autorité des officiers de l’empire continua d’être reconnuë dans les pays qui sont sur la rive gauche du Rhin, depuis Basle jusques-à la Moselle, et qu’elle n’y fut détruite, quoique ces officiers n’obéîssent plus à un empereur, que lorsque la nation des allemands s’empara de cette contrée vers l’année quatre cens quatre-vingt dix.