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autant qu’il le loüe, si lorsqu’il écrivit la lettre qu’on vient d’extraire, il eût été instruit du secret de ce prince.

Sidonius ne sçavoit même rien encore de la commission de Licinianus lorsqu’il écrivit à Felix la lettre, où il le prie de lui mander quels ordres avoit apporté de la cour le questeur, et si tout le bien qu’on disoit de cet officier étoit véritable. Notre auteur après avoir parlé avec beaucoup d’éloge de Licinianus, ajoûte donc : » Il a de plus la réputation d’un homme integre, & d’un Citoyen incapable d’imiter la conduite que tiennent communément les Romains chargés de traiter avec les Barbares. Ces indignes Ministres se soucient peu du succès de leur ambassade, pourvû que l’Ambassadeur y trouve son compte. »

Cependant l’instruction que Licinianus avoit reçûë, ne demeura pas secrete long-tems. Sidonius étoit déja informé de cette convention, bien qu’elle n’eût pas encore été mise en exécution, lorsqu’il écrivit la lettre dont nous allons donner quelques extraits. Elle est adressée à Graecus, évêque de Marseille, et qui par reconnoissance du bon traitement qu’il avoit reçu du roi des Visigots, avoit bien voulu entrer dans les interêts de ce souverain, et même relever de lui. Euric après s’être rendu maître de cette ville, l’avoit laissée en possession de son état, qui lui donnoit le droit de se gouverner en république sous la protection de l’empire, et à peu près comme se gouvernent aujourd’hui les villes impériales d’Allemagne. C’est ce qu’on peut prouver par un passage d’Agathias qui sera rapporté en son lieu, et dans lequel il est dit expressément, que la ville de Marseille avoit toujours été gouvernée en république, jusques aux tems où elle vint au pouvoir des princes enfans du roy Clovis.

Comme Marseille étoit une des premieres villes dont Euric se fût emparé après la rupture, il avoit voulu donner en la traitant bien, un exemple qui disposât d’autres villes à se soumettre à son gouvernement. Sidonius mande donc à Graecus dans notre lettre dont le porteur, à ce qu’il marque, étoit un homme de confiance : » On achette le repos de l’Italie