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sation où l’on ne répond, et où l’on n’entend qu’à l’aide d’organes empruntés, parce qu’il ne sçavoit pas le latin, lui qui avoit fait la guerre en Italie seize ans durant. Il n’y a point d’apparence ; il en aura usé, comme il en usa, uniquement pour se conformer à l’esprit d’une loi en vigueur dans la république de Carthage, et faite il y avoit déja long-tems, pour empêcher que ses officiers ne pussent communiquer avec l’ennemi, soit de vive voix, soit par écrit, sans l’intervention d’un tiers.

Pour revenir au latin d’Euric, ce fut lui qui, comme nous le dirons bien-tôt, fit rediger par écrit la loi nationale des Visigots, qui avant ce prince avoient vécu suivant une coutume non écrite. Or l’on n’a jamais vû ce code d’Euric qu’en latin, et les sçavans conviennent qu’il doit avoir été écrit en cette langue. Voilà ce qui n’auroit point été, si le législateur et même ses sujets naturels n’eussent sçû le latin.

Ma troisiéme reflexion concernera Leon, qui bien que Romain et catholique, étoit employé par Euric dans ses affaires les plus importantes. Leon étoit parvenu à sa place par son éloquence qui lui avoit fait remporter plusieurs des prix qui se distribuoient alors à ce talent. Il étoit arriere petit-fils d’un orateur celebre nommé Fronton. Sidonius dit dans une des deux lettres qu’il adresse à ce Leon qui le pressoit d’écrire l’histoire : » Vous êtes plus en état de composer les Annales de notre tems, que je ne le suis, vous qui êtes le depositaire des secrets d’un Prince très-accredité, qui prend connoissance des affaires de tout l’Empire, qui est informé des droits & des pretentions de toutes les Puissances, qui est au fait de leurs alliances, comme de leurs demeslés ; & qui est si bien instruit & des forces de chacune d’elles & de l’importance des pays qu’elle occupe. » On voit bien que cette lettre dont nous ne rapportons ici d’avance un extrait qu’à