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pour leur service un corps de troupes dans la Grande Bretagne en quatre cens soixante et huit, puisque comme nous l’avons vû, il y avoit déja vingt-cinq ans qu’ils avoient renoncé à la souveraineté de cette isle, en refusant aide et secours à ses habitans. Cependant les circonstances de la narration de Jornandès et plusieurs autres faits que nous rapporterons dans la suite, empêchent de douter que ce ne soit dans la Grande Bretagne qu’ait été levé le corps que Riothame amena au service de l’empire la seconde année du regne d’Anthemius, et qui fut posté dans le Berri. D’ailleurs l’état où étoit alors cette isle rend très-vraisemblable qu’on y ait pû lever le corps de troupes dont nous parlons.

Les Bretons abandonnés à eux-mêmes par l’empereur, disputerent si bien le terrain contre les Saxons, que jusqu’à l’année quatre cens quatre-vingt-treize, ils se maintinrent non-seulement dans le païs de Galles, mais encore dans la cité de Bath et dans quelques contrées voisines. Ce ne fut que cette année-là, comme nous le dirons dans la suite, que le Saxon les relegua au-delà du bras de mer qui s’appelle aujourd’hui le golphe de Bristol, et que plusieurs d’entr’eux abandonnerent leur patrie pour aller s’établir ailleurs. La partie de la Grande Bretagne que les Bretons défendoient encore en quatre cens soixante et huit, devoit donc fourmiller d’hommes aguerris, parce qu’ils avoient toujours les armes à la main contre les Saxons. Ainsi quoique les Bretons ne fussent plus sujets de l’empire, Riothame aura sans peine enrollé parmi eux autant de soldats qu’il avoit commission d’en lever, et ces soldats se seront engagés d’autant plus volontiers, qu’il étoit question d’aller faire la guerre dans les Gaules, où ils esperoient de toucher une solde reglée, et où ils sçavoient bien qu’ils auroient de bons quartiers. Enfin les peuples n’oublient pas en un jour leur ancien souverain, lorsqu’ils ont été contens de son administration.

Si j’appelle Riothame le chef qui commandoit nos Bretons Insulaires, et que Jornandès nomme dans son texte, Riothime, c’est en suivant Sidonius Apollinaris, qui l’appelle Riothame dans une lettre qu’il lui écrivit, et dont nous allons faire mention. Sidonius qui eut beaucoup de relation avec lui, à l’occasion des désordres que nos Bretons faisoient quel-