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ralement parlant, ils entendoient tous le latin en quatre cens cinquante-neuf. Avant même que les Francs eussent établi sur le territoire de l’empire aucune colonie indépendante, le latin devoit être dans leur païs une langue aussi commune, que l’est le françois dans la partie de la Suisse où la langue naturelle est l’allemande. La relation qui étoit entre les Francs et les Romains, et dont nous avons parlé fort au long, avoit dû rendre la langue latine très-commune dans l’ancienne France, et réciproquement celle des Francs commune dans les païs qui n’en étoient séparés que par un fleuve. Il n’étoit guéres plus difficile aux barbares d’apprendre à parler latin, qu’aux Romains d’apprendre la langue germanique. Aussi voyons-nous que dès le regne d’Auguste, il y avoit déja plusieurs païs où le latin étoit une langue sçûë de beaucoup de monde, quoiqu’ils ne fussent point sous la domination de Rome. Velleïus Paterculus en parlant de la guerre que les habitans de la Pannonie et d’autres païs qui n’avoient point encore été réduits en forme de province, déclarerent à l’empire, dit : que non-seulement les Pannoniens avoient connoissance de la discipline militaire des Romains, mais qu’ils sçavoient encore la langue de ces derniers. Supposé néanmoins que les Francs qui suivoient Clodion, lorsqu’il s’établit entre l’Escaut et la somme vers l’année quatre cens quarante-cinq, n’eussent point appris déja le latin en fréquentant les Romains, et en servant dans leurs armées, ils en auront appris du moins quelque chose dans le commerce continuel qu’ils eurent après cette occupation, avec les anciens habitans de la seconde Belgique, au milieu desquels ils s’étoient domiciliés. La langue latine étoit alors une langue vivante. Il doit encore être arrivé que les enfans de cette peuplade, qui en quatre cens quarante-cinq étoient au-dessous de l’âge de dix-huit ans, ayent appris à parler la langue latine, même sans avoir pensé à l’étudier. On sçait combien à cet âge les hommes ont d’aptitude pour apprendre les langues qu’ils entendent parler sans cesse. Or ces enfans devoient faire déja une grande portion des chefs de famille sujets de Childéric dans le tems qu’ils choisirent Egidius pour les gouverner.

Enfin on ne sçauroit douter que lors de la mort de Childéric, les Francs ses sujets ne sçussent tous, généralement parlant, la langue latine. En voici la preuve. Personne n’ignore que nos