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et par conséquent, lorsqu’il n’avoit point encore achevé la seconde année de son regne. En effet Martian avoit été proclamé empereur au mois d’août de l’année quatre cens cinquante.

Théodoric II et son frere Fréderic se montrerent véritablement pendant plusieurs années, très-attachés aux interêts de l’empire. Nous verrons même que Theodoric rendit plusieurs services importans aux Romains pendant les cinq ou six premieres années de son regne. Quant à Fréderic, les Romains avoient tant de confiance en lui, qu’ils lui donnerent la commission de faire la guerre en leur nom aux Bagaudes de l’Espagne Tarragonoise, qu’il battit en plusieurs rencontres.

Je crois qu’il est à propos, avant que de continuer l’histoire des évenemens arrivés dans les Gaules, de rapporter ici la peinture que Sidonius Apollinaris fait de la maniere de vivre, et de la cour de Theodoric II. Elle servira à donner quelque idée de la cour de nos premiers rois. S’il y avoit de la difference, pour parler ainsi, entre la cour de Tournai et celle de Toulouse, c’est que la premiere devoit être encore moins sauvage que l’autre. Il y avoit déja pour lors deux cens ans, que les Francs habitués sur les bords du Rhin, fréquentoient les Romains, et qu’ils passoient la moitié de leur vie dans les Gaules, au lieu qu’il n’y avoit pas encore quarante-cinq ans que les Visigots partis des bords du Danube, s’étoient établis dans ce païs-là, et qu’ils avoient commencé à s’y polir par le commerce des anciens habitans.

Vous m’avez prié plusieurs fois, dit Sidonius, dans une Lettre qu’il écrit à son beau-frere Agricola, de vous donner une juste idée de la personne & de la maniere de vivre du Roi des Visigots Theodoric II. que la voix publique vante comme un Prince très-exact à remplir les devoirs de son rang & ceux de la vie civile. Je vais, autant que l’étenduë d’une Lettre peut le permettre, contenter une curiosité si louable & si digne d’un citoien qui prend à cour les interêts de la République. Theodoric a tant de belles qualités naturelles & acquises, qu’il est un homme presqu’accompli, & donc le mérite se fait connoître, même à ceux qui n’approchent que rarement de sa personne. Ses mœurs sont telles, que malgré l’envie qu’on porte naturellement aux