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ennemis jusques à la nuit noire, se trompa quand il voulut retourner dans son camp. Il prit le camp des Huns pour celui des Visigots, et il s’approcha si près du camp des Huns, qu’il en sortit du monde dans le dessein de l’enlever. Il fut même démonté après avoir été blessé à la tête ; mais les Visigots qui le suivoient, le secoururent si à propos, qu’ils le dégagerent, et qu’ils l’emmenerent dans sa tente. Aëtius inquiet de ce qui seroit arrivé à ce corps de Visigots, courut aussi quelque danger pour s’être trop avancé afin d’apprendre plûtôt de ses nouvelles. Il se trouva souvent au milieu de plusieurs pelotons des ennemis qui s’étoient ralliés. Cependant il rentra sain et sauf dans son camp, où ses soldats, tout vainqueurs qu’ils étoient, ne laisserent point de passer la nuit sous les armes.

Le lendemain, les Romains virent sensiblement que l’avantage de l’action avoit été pour eux. Le champ de bataille étoit jonché d’ennemis, et Attila se tenoit renfermé dans son retranchement, sans oser mettre dehors aucunes troupes. Il se contentoit de faire sonner les trompettes, et de faire entendre les autres instrumens dont on se sert à la guerre, afin de donner à penser qu’il se disposoit à une nouvelle action. Les Romains et leurs alliés tinrent donc un conseil de guerre, pour y résoudre ce qu’il y avoit à faire, et s’il convenoit d’investir le camp des ennemis, pour l’affamer, ou si l’on insulteroit l’enceinte de chariots dont il étoit environné, bien qu’elle fût d’une approche dangereuse, à cause des archers et des autres gens de trait qui la défendoient. Quant au roi des Huns, dont les disgraces n’avoient point abbattu le courage, il avoit pris son parti. Convaincu que ses retranchemens seroient emportés s’ils étoient attaqués, il avoit fait dresser au milieu un bucher, où son intention étoit de mettre le feu et de s’y jetter dès qu’il verroit son camp forcé, afin que lui, qui jusques-à ce jour avoit été la terreur des nations, ne tombât point, même après sa mort, au pouvoir d’une d’entr’elles.

Pendant qu’Aëtius et ses alliés tenoient le conseil de guerre, dont nous venons de parler, plusieurs détachemens de l’armée des Visigots battoient la campagne, pour avoir des nouvelles de Theodoric qui ne se trouvoit point. Enfin, quelques-uns d’entr’eux plus braves que les autres, ayant eu la hardiesse d’aller