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j’entends parler, dit Salvien. Ces rébelles n’ont abjuré la qualité de Romain, qu’après avoir été privés des droits de leur naissance par les Magistrats qui les maltraitoient, les dépouilloient, & qui les égorgeoient plûtôt, qu’ils ne les faisoient mourir. Nous sied-il après cela de reprocher leur état present à ces Sujets infortunés ? Pouvons-nous leur imputer comme un crime de s’être rendus dignes du nom que nous les avons contraints de porter ? Devons-nous traiter, de gens sans foi, de rébelles, ceux que nous avons comme forcés à se révolter ? En effet, qui les a fait devenir Bagaudes : Ne sont-ce pas nos injustices : Ne sont-ce pas ces Sentences de confiscation & de proscription rendues par des Magistrats avides & corrompus, qui vouloient s’enrichir en levant les deniers publics, & qui moyennant quelques avances qu’ils avoient faites, étoient devenus les véritables Propriétaires des revenus du Prince ? Ces hommes féroces en ont usé avec les Habitans des Départemens dont on leur avoit confié l’administration, en bêtes carnassieres, & non pas en Bergers. Ils ont dévoré le Peuple dont ils devoient être les Pasteurs. Plus cruels que les Voleurs de grands chemins qui se contentent de détrousser le voyageur qui tombe entre leurs mains, ils s’en sont pris à la personne de l’infortuné qui n’avoit point ce qu’ils lui demandoient. Voilà pourquoi tant de Sujets de l’Empire, qu’on n’y traitoit plus comme des Citoyens, se sont lassés de souffrir les supplices ausquels l’avidité des Officiers du Prince & des Exacteurs, les condamnoit, & n’ont plus voulu demeurer Sujets de la Monarchie Romaine. Ils ont