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dre où sont les passages dans son livre, uniquement afin de parler de la cause, avant que de parler de son effet. L’auteur qui a écrit en orateur, et qui composoit pour des contemporains, qui avoient sous les yeux les choses dont il traite, a pû se dispenser de s’assujettir à l’ordre naturel.

« Les Citoyens des Ordres inférieurs sont traités si durement, qu’ils doivent tous aspirer à se délivrer du joug ; c’est le poids seul de ce joug qui les empêche de le secouer. S’ils n’en sont pas libres encore, croyons que ce n’est pas leur faute. Quels sentimens veut-on qu’ayent des Peuples exterminés, pour ainsi dire, par les impositions, & qui sont continuellement à la veille de devenir Esclaves, faute d’avoir acquitté des subsides, qu’ils se trouvent presque toujours hors d’état de payer, qui sont réduits à quitter leurs maisons, pour n’y être pas mis à la torture, & qui se condamnent souvent à l’exil, pour ne point souffrir les supplices ? L’ennemi ne leur est point aussi redoutable que l’Exacteur des revenus du Prince. Ils se réfugient donc chez les Barbares, pour éviter les persecutions des Collecteurs des deniers publics. Ces véxations pourroient encore paroître supportables, si tous les Citoyens les souffroient également. Ce qui acheve de les rendre telles qu’on ne sçauroit les endurer, c’est qu’il s’en faut beaucoup que tout le monde porte sa part des charges publiques. Le pauvre est obligé de payer pour lui-même & pour le riche. C’est sur les épaules des foibles qu’on mer le fardeau des plus robustes, & il faut bien ainsi qu’il écrase les premiers. Ces malheureux sont à la fois la victime de leur propre misere & de i l’envie des riches, deux fleaux dont il semble que l’un dût les garantir de l’autre. Pourquoi ne peuvent-ils point payer les charges publiques ? c’est qu’on leur demande plus