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blir dans les païs septentrionaux de l’Europe, et l’un et l’autre ils étoient devenus les dieux tutélaires des nations qui descendoient d’eux. C’étoit à eux que les Saxons faisoient ces sacrifices de victimes humaines, dont il est si souvent parlé dans l’histoire. Ce Thor est peut-être le même Tuder dont Tacite dit : que les descendans avoient regné jusques à des tems très-voisins du sien, sur les Marcomans, et sur les Quades qui les respectoient comme des hommes sortis du sang le plus illustre qui fut parmi eux.

Deux choses seront arrivées dans le cours des siécles. La premiere aura été que les descendans de Thor venant à se diviser en plusieurs peuples, le peuple aîné, s’il est permis de parler ainsi, aura conservé comme son nom propre, le nom sous lequel toute la nation avoit d’abord été connuë, tandis que l’un des peuples cadets aura été appellé Saxon, l’autre Sueve, l’autre Chérusque, etc. Ensuite le nom patronimique de ce peuple aîné, aura été prononcé differemment, et par conséquent écrit differemment. Les Romains l’auront adouci comme ils ont certainement adouci plusieurs noms des peuples germaniques, quand ces maîtres du monde ont bien voulu les latiniser. C’est ainsi que du mot Cherstken ils avoient fait le mot Cherusci le nom d’un des plus celebres peuples de la Germanie. Ainsi les Romains auront encore dit Tungri pour Thuringhi.

Il y a plus : dans le même païs, on aura prononcé differemment, au moins durant un tems, le nom des Tungriens, c’est une variation à laquelle ont été sujets tous les noms propres des barbares, dont parlent les écrivains latins du cinquiéme et du sixiéme siecles. En combien de manieres n’ont-ils pas ortographié le nom d’Attila ? En combien de manieres n’ont-ils pas écrit les noms de Clovis et de Clotilde, parce que les Romains, les Ostrogots et les Francs prononçoient ces mots suivant le génie de leur langue, et qu’ils l’écrivoient ensuite, suivant la valeur que les caracteres avoient dans chaque langue. Les Francs mêmes, après avoir demeuré