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à quelque peuplade de barbares, une ville capitale de cité, afin que le roi ou le chef de cette peuplade y fît sa résidence. En lisant ce que dit Idace concernant le retour des Visigots dans les Gaules, on est porté à croire, comme il a été déja remarqué, qu’on abandonna pour lors à leur roi la ville de Toulouse, pour y tenir sa cour, et l’histoire des tems posterieurs confirme dans cette pensée. Mais à moins qu’il n’y eût quelque article spécial inseré à ce sujet dans les conventions dont il s’agit, je crois toujours que les senats des villes, dans le district de qui les Visigots par exemple, avoient leurs quartiers, n’étoient pas plus comptables de leur gestion au roi de ce peuple, qu’ils l’étoient auparavant au maître de la milice, dans le département de qui ces villes étoient assises. Or nous avons rapporté ci-dessus une loi impériale, où il est statué expressément que les officiers militaires ne devoient avoir de l’autorité que sur les troupes, et qu’ils ne pouvoient s’arroger aucun pouvoir sur les citoïens qui n’y étoient pas enrollés.

M De Tillemont dit donc très-bien[1] : « Il faut remarquer quand les Romains donnoient une Province à des Barbares, qu’ils prétendoient, autant qu’on en peut juger par l’Histoire, ne la leur donner que comme à des Sujets, pour y habiter avec les Naturels du pais, en partager les terres avec eux, & donner des Soldats à l’Empire. » Mais les conjonctures survenues depuis l’année quatre cens dix-neuf où nous en sommes ; enfin, le renversement du trône de l’empire d’Occident arrivé en quatre cens soixante et seize, donnerent aux Visigots, qui avoient la force à la main, les moyens d’étendre leurs droits, de s’en arroger de nouveaux, d’assujettir les capitales des cités, et de se rendre peu-à-peu les veritables souverains des provinces, dont ils ne devoient être, s’il est permis de parler ainsi, que la garnison. Ce que firent les Visigots dans leurs quartiers, les Francs et les Bourguignons le firent aussi dans les quartiers où ils s’étoient établis à titre d’hôtes ou de confédérés. On observera cependant que même après que les barbares domiciliés sur le territoire de Rome se furent rendus réellement indépendans, l’empereur ne laissoit pas encore de leur parler comme si le païs dont ils jouissoient étoit toujours du domaine de l’empire. On verra que lorsque Valentinien IIIe demanda du secours contre Attila, à Theodoric premier roi des Visigots, il lui écrivit. « Donnez du secours à la république, vous qui êtes un de ses

  1. Hist. des Emp. Tom. 5. p. 641.