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Gaules, et ces deux nations intimidées se continrent dans les païs qu’elles occupoient alors ; c’est-à-dire, qu’elles n’envahirent plus les contrées voisines, et qu’elles discontinuerent même d’y faire des courses. Ainsi le passage de Jornandés ne signifie point que les Bourguignons et les Francs ayent alors repassé le Rhin pour retourner dans leur ancienne patrie. Comme nous le verrons par la suite de l’histoire, les Bourguignons demeurerent dans l’Alsace ou dans les païs voisins, et les Francs resterent dans les régions des Gaules qu’ils avoient déja occupées, dans celles où nous verrons qu’ils étoient encore quand Castinus les attaqua en quatre cens dix-huit, et dans lesquelles ils se maintinrent comme peuple indépendant, jusqu’à la guerre qu’Aëtius leur fit en quatre cens vingt-huit. Quelle étoit cette contrée des Gaules dont les Francs auront pû se saisir à la faveur de leurs liaisons avec Jovinus ? Celle dont nous verrons qu’Aëtius les déposseda, la partie de la rive gauche du Rhin séparée de l’ancienne France uniquement par le lit de ce fleuve.

Suivant le cours que prenoient les affaires de l’empire depuis qu’Honorius s’en reposoit sur Constance, on pouvoit esperer qu’au bout de quelque tems la tranquillité et l’ordre seroient rétablis dans le partage d’Occident ; mais les événemens qui arriverent durant le reste de l’année quatre cens treize et l’année suivante, y augmenterent bien le trouble et la confusion.

En premier lieu, Heraclien proconsul d’Afrique, s’y fit proclamer empereur, et peu de tems après sa révolte il arma la flote la plus nombreuse dont l’histoire romaine fasse mention, et il passa sur cette flotte en Italie, pour s’y faire reconnoître. Dans ces circonstances Honorius n’aura point manqué de rappeller une partie des troupes qu’il avoit dans les Gaules, afin d’en grossir l’armée qu’il vouloit opposer à son ennemi le plus dangereux. En effet l’armée de l’empereur se trouva bien-tôt assez forte pour donner auprès d’Otricoli une bataille contre celle de l’usurpateur. L’action fut sanglante. Enfin Heraclien fut défait et réduit à se sauver en Afrique. Ceux qui s’étoient attachés à lui dans sa prosperité, l’abandonnerent dans sa disgrace. Quand il voulut y lever une nouvelle armée, il ne trouva plus de soldats, et il fut obligé à chercher son azile dans un temple de Carthage ; c’est-là qu’il fut arrêté, et dans la suite il fut mis à mort.

En second lieu, Honorius et Ataulphe se brouillerent de