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rius le choix de Stilicon pour son principal ministre, choix qui fut la premiere cause de tous les malheurs dont nous allons parler. Theodose Le Grand avoit ordonné à sa mort, que durant la minorité d’Honorius, Stilicon auroit l’administration de l’empire d’Occident : et l’on croira sans peine que ce ministre prit, dès qu’il fut en possession du gouvernement, toutes les mesures soit bonnes soit mauvaises, que prennent les ministres ambitieux, pour n’être point aisément déplacés. Quand Stilicon ne les auroit point prises, le caractere doux d’Honorius ne lui eût pas permis d’entreprendre de le renvoyer. Ce Stilicon qui a porté à Rome des coups plus funestes que tous ceux qu’elle avoit reçus d’Annibal, de Mithridate, et de tous ses autres ennemis, étoit Vandale d’origine, mais il servoit l’empire depuis long-tems. Il étoit déja parvenu au grade de general, et il avoit même épousé une niéce de Theodose Le Grand, lorsque ce prince le fit, pour ainsi dire, le gouverneur d’Honorius. Enfin, Stilicon se vit à la fois le ministre, le favori, et le generalissime de son maître, à qui même il fit encore épouser sa fille.

Ses prospérités l’aveuglerent. Non content de regner sous le nom d’autrui, il voulut regner sous le sien, ou du moins mettre l’empire dans sa famille, en faisant monter sur le trône son fils Eucherius. Dans cette idée, Stilicon, tout chretien qu’il étoit, fit élever ce fils dans l’idolâtrie, afin de lui concilier l’affection des payens qui étoient encore en grand nombre, et qui étoient indisposés contre la postérité de Theodose, à cause du zele qu’il avoit eu pour la propagation de la veritable religion. Ce méchant homme fit encore une autre chose pour venir à son but. Jusqu’à l’année quatre cens six, il avoit été le fleau des barbares qui faisoient des incursions sur le territoire de l’empire, ou qui tâchoient de s’y cantonner. En plusieurs occasions il avoit remporté sur eux des avantages signalés. Il changea de conduite cette année-là, et il excita les barbares par des émissaires affidés, à faire une invasion dans les Gaules, où il leur fit entendre qu’ils ne rencontreroient pas de grands obstacles. Stilicon s’imaginoit qu’aussitôt que la confusion seroit dans la monarchie d’Occident, le souvenir des victoires qu’il avoit remportées obligeroit tout le monde à tourner les yeux sur lui, comme sur la seule personne qui pût être le restaurateur de l’Etat, et qu’on proclameroit empereur Eucherius.

Les émissaires de Stilicon ne dûrent point avoir beaucoup de peine à persuader aux Vandales et aux autres barbares, de ten-