Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/231

Cette page n’a pas encore été corrigée

Gratien commença son regne l’an de Jesus-Christ trois cens soixante et quinze. Ammien Marcellin dit que ce prince, en confiant à Nanienus l’exécution d’une entreprise importante, lui donna pour collegue un homme d’un grand courage, et d’une grande expérience à la guerre, Mellobaudés, un des rois des Francs, et qui étoit outre cela l’un des capitaines de la garde impériale. Je prie le lecteur de faire attention à ce passage, qui montre que les rois des Francs ne croyoient pas, non plus que les autres rois barbares, que leur couronne fût incompatible avec les grandes dignités de la monarchie romaine. Si Mellobaudés a bien pû vers l’année trois cens quatre-vingt, exercer l’emploi dont nous venons de le voir en possession, à plus forte raison Childeric aura-t-il pû cent ans après, accepter, quoiqu’il fût roi des Francs, la dignité de maître de la milice romaine dans les Gaules. Les apparences veulent que notre Mellobaudés soit la même personne que le Mérobaudés dont il est fait mention dans les fastes de Prosper. Cet auteur dit : » L’Empereur Gratien ayant perdu auprès de Paris une bataille contre les Troupes du Tyran Maximus, ce qui arriva par la trahison de Mérobaudés Maître de la Milice, il se sauva dans Lyon, où il fut tué. » Rien n’est plus naturel que de trouver en trois-cens quatre-vingt-quatre, maître de la milice, le même officier qu’on a trouvé l’un des capitaines de la garde impériale quelques années auparavant. Il est vrai qu’il y a un peu de difference entre Mellobaudés et Merobaudés ; mais on sçait bien que les Romains n’écrivoient pas tous de la même maniere le nom des barbares dont ils avoient occasion de parler. L’ortographe de ces noms étoit comme arbitraire dans la langue latine. En combien de manieres differentes les auteurs qui ont composé en cette langue ont-ils écrit le nom d’Attila. C’est un point de critique, qui dans la suite sera traité plus amplement. Il est toujours certain que ce Mérobaudés qu’on reconnoît à son nom avoir été barbare, fut deux fois consul. La premiere, en l’année de Jesus-Christ trois-cens soixante et dix-sept, et la seconde, en trois-cens quatre-vingt-trois.

Mellobaudés n’est pas le seul général Franc de nation que Gratien ait emploïé. Nous apprenons de Zosime que dans