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les faisant tremper, & lorsque le vaisseau est ainsi construit, on le couvre de peaux de bœufs. Les hommes confient ensuite leur vie à ces frêles machines nageantes sur les ondes en couroux. C’est dans de pareils bâtimens que le Venére vogue sur le Po, & que le Breton navige sur l’Océan qui l’environne. » Les Gaulois qui s’étoient établis dans le païs qu’on nomme aujourd’hui la Lombardie, y avoient porté l’art de construire ces sortes de barques. Il en est aussi fait mention dans Pline et dans Solin qui en disent la même chose que César et que Lucain, et qui en parlent comme de bâtimens d’un usage très-commun dans les mers septentrionales de l’Europe[1]. Le lecteur jugera bien par la légereté dont devoient être ces vaisseaux qu’ils alloient à rames et à voiles. On croira sans peine que leur construction n’étoit pas inconnuë aux saxons qui habitoient sur une côte de la Germanie si voisine de la Grande-Bretagne. Si l’on en pouvoit douter, il seroit facile de prouver par les auteurs du cinquiéme siécle, que les vaisseaux de course des saxons étoient d’une construction pareille à celle des bâtimens dont nous venons de parler.

Sidonius après avoir dit que le commandement armorique craignoit une descente des saxons sous le regne de Petronius Maximus, ajoute : « C’est un jeu pour eux que de naviger sur les mers britanniques dans des barques faites de cuirs cousus ensemble. » On pourroit croire que nos pirates avoient des vaisseaux construits plus solidement, et plus propres à résister aux violentes tempêtes des mers qu’ils fréquentoient. On pourroit se figurer que c’étoit sur des navires entierement construits de bonnes piéces de bois, qu’ils faisoient le trajet de leurs ports à l’embouchure des fleuves où ils prétendoient entrer, et qu’ils ne se servoient des barques fragiles, dont nous venons de donner la description, que comme nos vaisseaux de guerre se servent de leurs chaloupes. Mais on lit dans Pline que les bretons faisoient sur leurs bâtimens d’osier la traversée qu’il y avoit depuis leur isle jusqu’à celle de Mitis, qui cependant en étoit distante de six journées de navigation[2]. On voit encore dans d’autres histoi-

  1. Plin. hist. lib. 4. cap. 16. Solinus cap. 23.
  2. Hegesippus Hist. Ecl. lib. 5.