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à moins que ces limites ne se trouvassent par hazard être des bornes naturelles, comme sont les fleuves et les montagnes. Tous les païs dont s’agit, encore à demi défrichés, n’étoient point semés de villes dont chacune eût un district certain. Comme il n’y avoit point eu de demarcation faite entre ces peuples, les bornes arbitraires de leur domination se remuoient si souvent, qu’on ne sçauroit désigner les lieux qu’ils habitoient, que par le voisinage de la mer, des fleuves ou des montagnes.

Il seroit donc inutile de rechercher quelle étoit l’ancienne patrie des nations germaniques, et de quelle contrée elles étoient parties pour venir s’établir dans le païs qu’elles occupoient au commencement du cinquiéme siécle, et même de vouloir marquer précisement quelles étoient les bornes de la region que chacune d’elles possedoit, ou plûtôt occupoit alors. Nous venons d’en dire la raison. Ceux qui voudront s’instruire de ce qu’il est possible de sçavoir concernant ces deux points-là, pourront consulter le docte livre que Cluvier a écrit sur la Germanie ancienne. Nous nous contenterons donc ici, de parler des mœurs, des usages, et des forces de chacune de ces nations, et d’indiquer quels étoient à peu près, les lieux où elle habitoit immédiatement avant que d’entrer dans les Gaules pour s’y établir.

Les Bourguignons occupoient au commencement du cinquiéme siécle le païs qui est à la droite du Rhin, entre l’embouchure du Necre et la hauteur de la ville de Basle. Ammien Marcellin dit que cette nation étoit très-nombreuse et composée d’hommes braves qui s’étoient rendus la terreur des peuples voisins. Orose en parlant d’une expédition faite vers l’année trois-cens soixante et dix, et dans laquelle les Bourguignons prirent part en qualité d’alliés de l’empire, dit qu’ils se presenterent sur les bords du Rhin au nombre de quatre-vingt mille combattans. C’en est assez pour juger que notre nation devoit être très-nombreuse. Voici encore ce qu’on lit dans Orose qui écrivoit vers l’année quatre-cens vingt, concernant l’origine et l’état où se trouvoit de son tems la nation des Bourguignons dont pour lors une partie avoit déja passé le Rhin pour s’établir dans les Gaules. » On dit que Drusus Nero & Tibére son frere