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conquis l’Egypte, il fit en personne le recensement des Gaules dont nous avons parlé, et qu’il y établit le tribut tel qu’il se payoit encore sous Vespasien. Il faut qu’Auguste eût alors augmenté si considerablement les subsides que les Gaules avoient payés jusques-là, qu’on y ait regardé cette augmentation, comme ayant été le véritable établissement du tribut, qui devint alors onereux, de leger, d’insensible qu’il étoit auparavant. Ce qu’on païa depuis l’année sept cens vingt sept, aura fait regarder ce qu’on avoit payé précédemment, plûtôt comme une subvention, que comme un véritable tribut. Que pouvoit coûter à chaque particulier son contingent dans dix-huit millions de nos livres repartis sur toutes les Gaules ? Quoiqu’il en ait été, il est certain que les derniers empereurs devoient tirer des Gaules beaucoup plus que n’en tiroit Auguste, et cela par plusieurs raisons.

En premier lieu, les richesses des Gaules s’augmenterent tellement dès que leur assujettissement aux Romains y eût établi une tranquillité inconnuë auparavant, et dès qu’elles purent commercer librement dans tout l’empire, qu’on les citoit ordinairement comme sa province la plus opulente. Lorsque l’empereur Claude voulut faire approuver par le sénat, le dessein qu’il avoit de rendre ceux des Gaulois qui tenoient le premier rang dans leur patrie, capables de posseder les plus grandes dignités de la république, ce prince, parmi plusieurs autres raisons allégua celle-ci : « Ne vaut-il pas mieux pour nous, gager les Gaulois à venir dépenser leurs revenus dans Rome, que de les laisser jouir de leur or & de leurs richesses au-delà des Alpes ? » « Les Gaules, dit aux Juifs le jeune Agrippa en les haranguant, pour les dissuader de se révolter contre Néron, ont chez elles une source intarissable de toutes sortes de biens qu’elles distribuent dans le reste du monde. Cependant elles sont contentes de faire une des Provinces de l’Empire Romain. Elles sont persuadées que c’est de son bonheur que dépend leur félicité. » Comme le revenu du souverain consiste toujours, pour la plus grande partie, en redevances et en droits, qui se perçoivent sur les fruits qui se recueillent, sur les marchandises qui se fabriquent, et sur la consommation qui s’en fait, il faut que ce revenu augmente considerablement dans un Etat qui devient plus riche par le commerce, qu’il ne l’étoit au-