Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/184

Cette page n’a pas encore été corrigée

sarre, parce que nous ignorons tous les motifs qu’ils peuvent avoir eus de s’en servir. Tâchons d’expliquer quel étoit ce moïen, car il nous paroît que faute de l’avoir bien compris, plusieurs sçavans modernes ont mal entendu Cassidore, et les auteurs ses contemporains. Cet expédient consistoit à associer plusieurs personnes pour payer entr’elles une seule tête ou cotte-part de capitation. Il étoit bien plus simple, dira-t-on, de faire ce que Julien fit dans les Gaules, c’est-à-dire, de reduire cette cotte-part aux deux tiers ou à la moitié. Mais si on avoit pris le parti de baisser les cotte-parts, le riche eût autant profité de la diminution que le pauvre. Enfin, comme je l’ai déja dit, nous ignorons les raisons que les empereurs peuvent avoir euës de mettre en usage l’expédient dont nous parlons, et dont il suffit ici de prouver que ces princes se sont servis.

Quelqu’un des prédécesseurs de Constantin Le Grand avoit-il eu recours à cet expédient ? Je l’ignore. Il est certain seulement que ce prince le pratiqua, et qu’il fut pratiqué depuis lui. Voici ce que dit, à ce sujet dans son panégyrique, le rheteur Eumenius, dont l’on doit croire le témoignage, d’autant plus volontiers, qu’il parle de choses qui s’étoient passées à ses yeux.

Sous le regne de Constantin Le Grand, il y avoit dans la cité d’Autun, suivant le dernier recensement, vingt-cinq mille hommes, ou veuves, ou autres chefs de famille. Personne n’ignore qu’alors la cité d’Autun étoit bien plus étenduë, que ne l’est aujourd’hui le diocèse d’Autun. Cette cité devoit par conséquent vingt-cinq mille têtes , ou vingt-cinq mille cotte-parts de capitation. Son peuple étant hors d’état d’acquitter cette charge, elle s’adressa à Constantin qui lui en remit le quart et même plus, en la dispensant de payer sept mille de nos cotte-parts : les vingt-cinq mille cotte-parts furent donc reduites à dix-huit mille. Or, comme il paroît en lisant la harangue faite à Constantin par Eumenius au nom de la cité d’Autun : que le bienfait de l’empereur tourna à l’avantage de tous les vingt-cinq mille contribuables : on voit bien que ce bienfait ne con-