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ginairement aussi forte que celle des citoïens riches. Une imposition assise sur ce pied-là paroît avec raison, bien injuste, et sujette à bien des non-valeurs, si l’on en juge par rapport à l’état présent de la societé, composée entierement d’hommes libres, dont il est comme impossible que plusieurs ne soient pas dans l’indigence. Mais durant le cinquiéme siécle, la societé étoit encore composée dans les Gaules d’hommes libres et d’esclaves. Ainsi il ne devoit point y avoir de citoïen qui ne pût subsister commodément par son industrie comme par le travail de ses esclaves, et qui ne fût en état par conséquent de payer une somme raisonnable à titre de capitation. Si la mauvaise conduite, ou le malheur des tems faisoit tomber un citoïen dans l’indigence, il perdoit bien-tôt son état de citoïen. Il étoit comme impossible qu’avant que d’être ruïné, il n’eût fait bien des emprunts, et les loix ordonnoient en plusieurs cas, que le débiteur insolvable devînt l’esclave de ses créanciers. Il a même été un tems, où les loix imperiales condamnoient à la servitude les mandians valides[1].

Toutes les provinces de l’empire n’étant point également pécunieuses, il est à croire que la capitation qui se payoit en deniers, n’y étoit pas également forte. Ce que nous sçavons certainement, c’est que dans le tems où Julien vint commander les armées dans les Gaules, qui passoient véritablement pour une des plus riches provinces de l’empire, les collecteurs du tribut public y levoient vingt-cinq sols d’or, à raison de chaque tête ou de chaque cotte-part de capitation ; mais ce prince aïant diminué la dépense, et son oeconomie aïant mis la république en état de diminuer aussi la recette, chaque cotte-part de la capitation, se trouvoit réduite à sept sols d’or lorsqu’il quitta cette province.

Qu’on ne juge point de la somme que la capitation des Gaules levée à raison de vingt-cinq sols d’or sur chaque chef de famille, devoit produire aux empereurs, par celle que produiroit aujourd’hui une semblable cottisation. En premier lieu, tous les citoïens ne payoient pas, chacun à lui seul une tête , ou une cotte-part entiere de capitation. Tout citoïen ne payoit point à lui seul, comme nous allons le voir, vingt-cinq sols d’or, dans le tems que chaque cotte-part montoit à cette som-

  1. L. de Mend. Validis.