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ral, laquelle contenoit l’énumeration des terres appartenantes à l’empire dans la cité, et c’étoit conformément à cette copie que les décurions faisoient payer à chaque particulier sa redevance annuelle, sur laquelle, ainsi que sur tous les deniers qu’ils percevoient, on leur accordoit une remise. Les décurions disposoient ensuite, selon les ordres du prince, et sous la direction du comte, de celles de ces redevances qui étoient payables en denrées, et ils portoient dans le trésor public celles de ces redevances qui étoient payables originairement en deniers, ou qui depuis la premiere concession, avoient été évaluées en argent.

On voit dans le code de Justinien plusieurs loix faites par les empereurs, en differens tems, pour obvier à ce que les terres, dont la proprieté appartenoit à l’Etat, demeurassent incultes, et pour faciliter le payement des redevances dont elles étoient chargées. Quoiqu’il arrivât, le fisc étoit toujours le premier créancier de ceux qui joüissoient de ces sortes de terres. Il y a plus. En quelques mains qu’elles tombassent, elles étoient toujours tenuës d’acquitter la redevance dont elles se trouvoient chargées dans le canon ; mais cette redevance n’empêchoit pas que la condition du possesseur ne fût toujours assez bonne, du tems de la république et sous le haut-empire. Les Etats afferment le plus souvent leurs revenus à un prix moindre que celui auquel les particuliers proprietaires donnent à ferme les leurs. Dans le sixiéme siécle, la condition des citoïens qui tenoient ces terres décumanes étoit devenuë assez chetive. On en peut juger par le passage de Procope que nous allons rapporter.

Cet historien raconte donc que l’empereur Justinien lorsqu’il avoit jugé à propos de confisquer les biens de quelques personnes opulentes, commençoit par s’approprier tous leurs effets mobiliers, et puis celles de leurs terres dont on pouvoit tirer un revenu raisonnable ; mais presque toujours, ajoute Procope, Justinien laissoit à nos malheureux leurs terres décumanes, sans leur faire pour cela une grace bien considerable. En effet, c’étoit plûtôt les condamner à mourir de langueur, que de leur donner de quoi vivre. Les impositions dont cette na-