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dans les curies, de prendre à ferme, même dans les cités autres que la leur, les métairies et les pâturages qui faisoient partie des domaines de la république. Néanmoins les personnes en crédit trouvoient le moyen d’éluder ces loix, en prenant les baux sous le nom emprunté d’un homme à eux. Voilà l’usage qui se faisoit des terres actuellement en valeur.

Quant aux terres incultes et abandonnées, dont il se trouve toujours une assez grande quantité dans les païs qui viennent d’essuyer les maux de la guerre, comme il étoit impossible de faire au juste l’estimation de leur valeur, on ne les affermoit pas, moyennant une redevance fixe et certaine, évaluée à tant, ou à tant de denrées, quelle que pût être la récolte, elles s’affermoient à des conditions telles que la république ne pouvoit pas être trompée de beaucoup dans ces sortes de marchés, et que d’un autre côté ceux qui les prenoient ne couroient pas le risque d’y perdre excessivement. On adjugeoit donc, en observant les formalités ordinaires, ces terres incultes, à ceux qui se chargeoient de les mettre en valeur, à condition de payer à l’Etat chaque année, non pas une redevance fixe et certaine, mais une redevance proportionnée à la récolte qui se pourroit faire. Cette redevance consistoit ordinairement dans la dixiéme partie des grains et des légumes qui se recueilleroient sur les terres données à défricher, et dans la cinquiéme partie du produit, soit des arbres, soit de celles des plantes qui rapportent durant plusieurs années, lorsqu’une fois elles sont venuës. Rien n’étoit plus équitable ni plus judicieux que l’apprétiation de cette redevance incertaine. On n’obligeoit le tenancier qu’à payer la dixiéme partie des grains et des légumes qu’il recueilleroit, parce que la culture de ces fruits exige beaucoup de soins, et demande beaucoup de dépense, au lieu qu’on l’obligeoit d’un autre côté à payer la cinquiéme partie du produit des arbres fruitiers, et de celui des plantes qui rapportent durant plusieurs années, sans avoir besoin qu’on les renouvelle, parce qu’on recueille ce produit avec moins de frais et moins de sueur. Il est vrai que suivant cette estimation les vignes se trouvent taxées au cinquiéme de leur produit, ce qui nous paroît d’abord une redevance bien lourde. Mais on la trouve plus légere dès qu’on a fait réflexion que la culture de la vigne