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chemens qui servissent dans toutes les Provinces. La Notice de l’Empire parle de plusieurs de ces détachemens qui servoient actuellement dans les Gaules lorsqu’elle fut rédigée.

Nous pouvons comparer cette Milice de soldats presens aux Janissaires de l’Empire Turc. Le nombre de ces Janissaires institués d’abord pour la garde de la personne du Sultan, a tellement été multiplié depuis, qu’il n’y en a plus qu’une partie dont la fonction soit de rester toûjours auprès du Grand-Seigneur. L’autre partie des Janissaires, & c’est la plus nombreuse, est partagée en differentes Troupes, distribuées sur les frontieres de l’Empire Ottoman, où elles sont le nerf de la Garnison des Places fortes. Des quarante ou cinquante mille Janissaires que le Grand-Seigneur habille & soudoye, il n’y en a ordinairement que treize mille de destinés spécialement à la garde de sa personne, & qui soient du College de Constantinople. Les autres sont répartis sur la frontiere pour la garde de laquelle ils ont été levés & ils sont payés. Ainsi comme le Corps des Janissaires est aujourd’hui partagé en Janissaires de la Porte, ou de la garde du Grand-Seigneur, et en Janissaires des Provinces, il est très-probable que dans le cinquiéme siécle le Corps des Soldats presens étoit divisé en Soldats presens qui servoient auprès de la personne du Prince, & en Soldats présens qui servoient tantôt dans une province & tantôt dans une autre. Je crois donc que c’est de ceux des Soldats presens qui gardoient le Prince, qu’il est parlé sous le nom de Soldats Palatins[1], dans une Loi d’Honorius que nous rapporterons bientôt, & que c’est de ceux des Soldats presens qui étoient à la suite des Commandans envoyés par l’Empereur dans les Provinces, qu’il y est parlé sous le nom de Soldats accompagnans [2].

Suivant la Notice de l’Empire il y avoit dans les Gaules, comme nous venons de le dire, un Corps considerable de la Milice des Soldats presens, & il y étoit commandé par un Lieutenant du Chef ou du Maître de cette Milice qui ne devoit pas quitter la personne de l’Empereur. Comme c’étoit par le ministere de ce Chef que les Géneralissimes qui commandoient dans les Diocèses, recevoient les ordres du Prince, le Lieutenant dont nous parlons ne devoit pas faire difficulté d’obéïr aux Géneralissimes. Ils ne pouvoient lui commander que ce qui étoit contenu dans les instructions, que son Supérieur particulier leur avoit envoyées. Il étoit donc impossible que les ordres que recevoit le Géneralissi-

  1. Milites Palatini.
  2. Milites Comitatenses.