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Enfin nous avons sous les yeux un exemple sensible de ces dénominations abusives, & qui semblent impliquer contradiction. On sçait que l’Etat connu dans la Societé des Nations sous le nom de Païs-Bas, a reçu cette dénomination, parce que la plus grande partie du territoire des Provinces dont il fut d’abord composé, est un Païs plat, & presque de niveau avec les eaux de la Mer qui le baigne, & avec celles des Fleuves qui l’arrosent. Qu’est-il arrivé dans la suite ? Les Souverains de cet Etat y ont joint des Provinces Méditerranées & montueuses, comme le Duché de Luxembourg, le Comté de Namur, et quelques autres. Mais dès que ces provinces ont été comprises dans les Païs-Bas, l’usage a fait oublier l’étimologie de Païs-Bas, & quelle étoit la nature de ces Provinces. L’on s’est accoûtumé à dire que le Duché de Luxembourg & le Comté de Namur étoient dans les Païs-Bas. On dit tous les jours que Luxembourg est la plus forte place des Païs-Bas, & qu’on va dans les Païs-Bas quand on part de Champagne pour aller à Namur. Après l’établissement du Commandement Armorique, on se sera de même habitué à dire que Sens, qu’Orleans étoient dans le Commandement ou dans le Païs Maritime.

C’est donc dans la Notice de l’Empire, & non pas dans César, ni dans Pline, qu’il faut prendre l’idée de l’étenduë qu’avoit, durant le cinquiéme siécle, la Contrée qu’on appelloit alors dans les Gaules le Païs Armorique, ou le Tractus Armoricanus ou Aremoricus . C’est faute d’avoir consulté là-dessus la Notice, que nos Auteurs ont mal compris ce qu’ont dit les Ecrivains du cinquiéme siécle, concernant la République des Armoriques, déja formée lorsque les Francs s’établirent dans les Gaules.

Quoique nous n’ayons que de foibles lueurs de ce qui s’y passoit sous le Bas-Empire, nous ne laissons pas cependant d’entrevoir les raisons qui porterent Constantin, ou celui de ses Successeurs qui avoit réglé les districts de chacun des Commandemens sur le pied où ils étoient lorsque la Notice fut rédigée, à mettre sous un seul & même chef presque toutes les forces destinées à garder les Côtes de cette grande Province sur l’Ocean, en un tems, où ses ennemis les plus incommodes, étoient les Pirates dont nous parlerons bientôt. Comme les Flottes ennemies n’avertissent point des lieux où elles prétendent faire leurs descentes, une seule Flotte