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ces, & n’en ont été empêchés que parce que le complot qu’ils tramoient aura été découvert avant qu’il fût entierement ourdi. Si l’on ne lit point deux cens de ces conjurations dans l’Histoire des Empereurs, c’est parce que nous avons perdu la plus grande partie des auteurs qui l’avoient écrite. Vulcatius Gallicanus cite dans la Vie d’Avidius Cassius, qui se voulut faire Empereur sous le regne de Marc Aurele, l’ouvrage d’un Æmilius Parthenianus un Auteur qui avoit composé l’Histoire de ceux qui dans tous les tems, avoient tramé des Conjurations, pour se rendre maîtres de la République. D’ailleurs l’Histoire aime à supposer que plusieurs des Gouverneurs de Provinces armées dont leurs Maîtres se défirent par toute sorte de voyes, & dont elle rapporte la fin tragique, étoient morts innocens. On ne veut point croire qu’une Conjuration qui n’a point éclaté ait été formée ; & si Galba la veille du jour qu’il fut assassiné, eût fait poignarder Othon, Othon peut-être seroit dans l’Histoire aussi peu coupable que Corbulon.

Nous avons déja dit que suivant l’établissement fait par Auguste, & qui a eu lieu jusqu’au regne de Constantin, il n’y avoit que deux des Provinces dans lesquelles les Gaules étoient divisées alors, qui fussent véritablement des Provinces armées, quoique les Troupes passassent quelquefois dans les autres, & que ces deux Provinces étoient la Germanique superieure, & la Germanique inferieure. On n’en confioit ordinairement le commandement qu’à des personnes qui avoient été Consuls. Il y avoit dans chacune de ces Provinces quatre Légions, avec un nombre proportionné de Cohortes auxiliaires, & ces Troupes, comme on l’a déja dit, étoient destinées à maintenir la paix dans les Gaules, et à empêcher que les Germains barbares qui habitoient sur la rive droite du Rhin, ne fissent des courses. Il n’y avoit que douze cens Soldats Romains dans l’interieur du païs. Joseph fait dire aux Juifs par le jeune Agrippa, lorsqu’il les harangua pour les dissuader de se révolter contre Rome : « Les Gaules obéissent aux Romains aujourd’hui les Maîtres du Monde ; quoiqu’ils ne tiennent que douze cens hommes dans l’interieur de cette Contrée, nombre qui n’excede pas le nombre de ses Villes[1]. »

  1. Guerre des Juifs, livre 2. chap. 28.