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du Prétoire qui commandoit ce Corps de Troupes.

Les Cohortes Prétoriennes, dont les soldats avoient une paye double de celle que touchoient les soldats des Légions, et qui acqueroient le droit de Veterance par seize années de service, au lieu que les soldats Légionnaires ne l’acqueroient que par un service de vingt années, faisoient un Corps de neuf à dix mille hommes presque tout composé d’Infanterie. Il avoit un Camp dans l’enceinte de Rome, et un Quartier dans Albane, Ville éloignée de trois ou quatre lieuës de la Capitale. L’Emploi principal de nos Cohortes étoit donc celui de servir de Garde à la personne du Prince, et de mettre en execution tous ses Ordres de quelque nature qu’ils fussent. Ainsi les Prétoriens faisoient non-seulement la fonction de Gardes du Corps près de l’Empereur, mais lorsqu’il avoit rendu sans forme de procès un Jugement qui condamnoit quelqu’un à l’exil ou à la mort, c’étoient eux qui se trouvoient chargés de l’exécution de la Sentence, et qui souvent même l’exécutoient de leur propre main. Les Prétoriens étoient Officiers de Justice aussi-bien que soldats. Quand on ne trouvoit pas indécent que le Prince lui-même fît toutes les fonctions de Juge, pouvoit-on trouver étrange que les Tribuns, les Centurions et les Soldats des Cohortes Prétoriennes, fussent assujettis à toutes les fonctions des Ministres subalternes des Tribunaux ? C’étoit sous Tibere que le Gouvernement de l’Empire avoit achevé de prendre sa forme & qu’on s’étoit formé l’idée de la Dignité Imperiale. Or Tibere lui-même avoit montré plusieurs fois qu’il ne la croyoit pas incompatible avec aucune des fonctions de la Magistrature. Plautius Silvanus ayant précipité du haut d’une fenêtre sa femme qui mourut de la chûte, Apronius le pere de cette malheureuse rendit sa plainte à Tibere, qui fit en personne la descente sur les lieux, où il trouva des preuves du crime que le mari nioit d’avoir commis, et il en fit son rapport au Sénat. Nous verrons même dans la suite de cet Ouvrage que nos