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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

« Il ordonna un jour qu’on lui amenât 300 de leurs filles vierges afin d’en faire ses esclaves. Il résidait alors dans le port de Kabara et commanda qu’elles lui fussent amenées à pied. Or elles n’étaient jamais sorties de leurs maisons. Les serviteurs de Sunni Ali les accompagnaient et les faisaient avancer. Elles arrivèrent ainsi jusqu’à un endroit où la fatigue arrêta leur marche. Sunni Ali fut averti de cet incident et ordonna de les massacrer. Toutes furent mises à mort. »

Avec les Askia les marabouts reconquirent aussitôt toute l’influence perdue. Askia-le-Grand, le fondateur de la dynastie, soit par conviction, soit par calcul pour faire le contraire de son prédécesseur, se montra croyant fervent et leur ami empressé. Aussi les avons-nous vus prêter un appui dévoué à l’usurpateur et légitimer, avec textes sacrés à l’appui, son usurpation.

Il fit d’eux son entourage habituel. Avant sans cesse recours à leurs lumières, les consultant avant de prendre une résolution, même lorsqu’il s’agissait d’une guerre, et leur demandant des projets de loi, il les traitait, en un mot, comme ses ministres. Une brochure retrouvée par nous dans une bibliothèque de Tombouctou, met en pleine lumière ce rôle des marabouts.

L’auteur n’est pas un Soudanais, mais un de ces docteurs arabes qui accoururent au Soudan sous le règne du glorieux monarque. Le portrait d’un de ces immigrés nous manquait encore. La physionomie très originale d’El Mouchéïli, va nous permettre de combler cette lacune.

Né à Tlemcen, en Algérie, «il joignait, dit un de ses biographes, à une intelligence peu commune, la passion de l’étude, et se distingua par sa piété autant que par son érudition. » D’une nature hardie et entreprenante, animé d’un zèle outré pour le Koran, il mit son savoir et son énergie au service du fanatisme.