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LE COMMERCE ET LA VIE

bottes rouges aux broderies de soie jaune et verte, en babouches, en coussins ou en reliures.

Nous nous dirigeons vers l’une de ces habitations de silhouette élevée, mais à façade délabrée, lézardée, surmontée d’un étage en miettes. C’est la demeure d’un grand négociant. Devant la porte bardée et close, mon guide fait l’habituel discours : les quelques mois de notre occupation n’ont pas encore suffi pour faire disparaître les vieilles habitudes de prudence. Ayant franchi une seconde porte ferrée, nous voici dans une grande cour, ombragée par une large véranda et des galeries à arceaux, qui courent sur les quatre faces — le patio des maisons d’Espagne. Au dehors la chaleur est forte. Ici c’est une fraicheur agréable. Et puis nulle trace de misère ni de délabrement. Tout est d’une propreté et d’un entretien émerveillants. Après le Lasciate ogni speranza ! de la façade, ce semble un paradis.

De ci de là, sous les galeries, des nattes et des coussins. C’est la pièce de réception, cette cour, c’est là que se traitent les affaires. On m’apporte une peau de panthère pour siège. D’un coffret en forme de châsse, le maître de céans tire de petites tasses en porcelaine et bientôt on nous présente du thé et du sucre, et de délicieuses dattes du Touat. Nous visitons ensuite les magasins : c’est, à travers toute la maison, un vaste entrepôt, où les sacs de mil s’entassent sur les sacs de riz, où les barres de sel se comptent par centaines. Les ballots de dattes voisinent avec des paquets de plumes d’autruche et des défenses d’éléphant cousues dans des peaux. Il y avait pour plus de 50,000 francs de marchandises derrière l’extérieur paravent de misère.

À côté des courtiers officieux il y a également le courtier officiel ou Taifa. Celui-ci se spécialise dans certains produits, tels que le sel, l’or, le bétail, les étoffes, etc. Il va de maison