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À TRAVERS LES SIÈCLES

La ville double maintenant son étendue. Toutes ses maisons sont bicn construites et alignées en rues régulières. Les anciennes mosquées sont rebâties et l’on en édifie de nouvelles. Une grande immigration de Songhoïs est venue renforcer les Diennéens, et contrebalancer l’élément arabe et berbère, dominant jusqu’alors. La langue de Dienné et de Gaô devient le parler courant. L’arabe reste la langue des relations avec l’étranger ainsi que le langage de la science. La mosquée-université de Sankoré atteint une notoriété lointaine. La renommée de ses professeurs est connue non seulement au Pays des Noirs, mais dans l’Afrique arabe même. Les savants étrangers accourent du Maroc, de Tunisie, d’Égypte.

La civilisation arabe a tendu la main à la vieille civilisation égyptienne, et de cette union résulte l’apogée de Tombouctou (1494-1591).

L’éclat fut tel qu’aujourd’hui il rayonne encore dans les imaginations, après trois siècles que l’astre s’en est allé déclinant. Telle fut la splendeur que, malgré un aussi long temps de vicissitudes, la vitalité de Tombouctou n’est point éteinte.

C’est avec la conquête marocaine que commence la décadence, en 1591. La forte armature forgée par Askia le Grand ayant été brisée, tout l’Ouest africain est ébranlé. Sur le Niger oriental les derniers Askia luttent pour l’indépendance nationale ; sur le Niger occidental, Dienné se soulève ; un peu partout les Touaregs, les Foulbés, les Bambaras, les Malinkés, imitent son exemple. Le nord et le sud sont également bouleversés. Tombouctou, leur intermédiaire, voit sa vie commerciale arrêtée. Elle-même se soulève à son tour : après une répression brutale, la fleur de ses savants est envoyée en exil au Maroc (1594). Puis une disette épouvantable, provoquée par le manque de pluie, visite la ville. On en est réduit à