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DE DIENNÉ À TOMBOUCTOU

toutes pièces par une demi-compagnie de tirailleurs soudanais. Au milieu d’un bois de palmiers-rhôniers sur les bords du Niger, imaginez une clairière. Là, sur un tertre rectangulaire et artificiel, se dressent quatre hangars se faisant vis-à-vis : ils ont été édifiés uniquement avec le bois des arbres abattus dans la clairière. Deux servent d’habitation aux blancs, officiers et sous-officiers ; les autres aux soldats noirs. Une palissade court autour du terrassement, dont les pentes sont en outre jonchées de fourrés d’épines mortes, et les abords tendus de fils de fer en prévision des assauts. Point de murs ni de meurtrières… Ne pas être surpris et pouvoir envoyer facilement des feux de salve, telle a été la donnée rudimentaire sur laquelle on s’est installé, ayant quelques pelles, pioches et haches pour tous outils et des soldats nègres pour tous artisans. Savez-vous ce que la construction du fort a coûté au budget ? La somme formidable de 49 fr. 50 !

Et pour ce prix il est même pourvu d’un merveilleux mirador d’où une vigie peut signaler les arrivées suspectes, et par terre et par eau. À quelques centaines de mètres des fortifications en épines mortes se dresse un monticule isolé sur le plat rivage. Ce n’est assurément pas une œuvre de la nature. De-ci, de-là, on y retrouve des pierres, des briques, qui ne manquèrent pas d’intriguer le capitaine Philippe, constructeur du fort d’El-Oual-Hadj, un des rares survivants de la colonne Bonnier, par ce fait que la garde de Tombouctou lui avait été confiée durant cette fatale reconnaissance. Interrogés, les indigènes racontèrent que plusieurs monticules semblables existaient dans les pays environnants, sur la rive droite comme sur la rive gauche du fleuve : la légende courait que c’étaient les demeures des chefs d’autrefois, tombées en ruines.

Tel n’est point mon avis. Je crois que ces monticules sont les tombeaux et non les palais de ces mêmes chefs. El