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ET L’ÉCREVISSE.

temps qu’ils n’avaient plus rien à craindre de lui, ils se fièrent à ses promesses et se livrèrent à ce perfide. Ce dernier tirait chaque jour un poisson de l’eau, commençant par les plus gros ; il le mettait sur son dos, et le transportait sur le sommet d’un rocher aride, où il le dévorait à son aise.

Bientôt il eut dévoré tous les poissons de l’étang. Il y restait encore une écrevisse, qui, se doutant de la trahison de l’oiseau, résolut de le punir comme il le méritait : pour exécuter son dessein, elle le supplia de lui rendre aussi le même service qu’il avait rendu aux poissons. Le cormoran ne se défiant de rien, met l’écrevisse sur son dos et la transporte sur le rocher. Arrivée là, cette dernière, n’apercevant nulle part le réservoir d’eau, ne remarquant de tous côtés que des rochers arides, et voyant en même temps la place toute couverte d’arêtes de poissons, reconnut sans en pouvoir douter la perfidie du cormoran. Mais celui-ci n’attendit pas long-temps le châtiment qu’il avait mérité ; l’écrevisse le saisit par le cou avec ses bras et l’étrangla.

Après s’être ainsi vengée de ce méchant, elle se traîna peu-à-peu dans son ancienne demeure, où elle continua à vivre en paix comme auparavant.