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DE SANDJIVACA.

se dirent-ils, dont la voix seule a répandu l’effroi dans l’âme du roi lion ! Se peut-il qu’un animal de sa force et de son courage soit dégénéré à ce point, d’être saisi de frayeur aux mugissemens d’un pauvre taureau abandonné de tous, et cassé de vieillesse ?

Après un instant de réflexion : Pourquoi, se dirent-ils, chercherions-nous à détromper le lion notre maître ? Que ne feignons-nous au contraire d’entrer dans ses inquiétudes, en lui faisant croire que ses alarmes sont fondées ? Peut-être résultera-t-il dans la suite quelque avantage pour nous de la crainte et du trouble où il vit ; du moins sera-ce une occasion de lui persuader que nos services lui sont nécessaires et qu’il ne peut se passer de nous.

Dans ce dessein, ils retournèrent auprès du roi lion, et l’abordant d’un air embarrassé : Grand roi, lui dirent-ils, nous venons d’avoir une entrevue avec le rival qui fait le sujet de vos inquiétudes, et nous sommes au désespoir d’avoir à vous annoncer que vos alarmes ne sont pas tout-à-fait sans fondement. Cet animal n’est autre que le roi taureau, la monture de Djagadisouara [1] ; il dit que Paramesouara ou Siva l’a

  1. Un des noms de Siva. V. Mœurs de l’Inde, t. II, p. 416